En Suisse, les entreprises – qu’il s’agisse de PME traditionnelles, de start-up ou de grandes sociétés – peuvent recourir à différentes solutions de crédit et de financement pour développer leurs activités, renforcer leur trésorerie ou financer de nouveaux projets. Voici un panorama des principaux mécanismes de financement et de crédit accessibles aux entreprises en Suisse :
1. Les prêts bancaires traditionnels
1.1. Le crédit d’investissement (ou crédit à moyen/long terme)
- Objectif : Financer l’achat de machines, d’équipements, de véhicules, la construction ou l’acquisition de biens immobiliers d’entreprise, etc.
- Modalités : Souvent accordé sur plusieurs années (de 2 à 15 ans, parfois plus). Les taux d’intérêt varient selon la conjoncture, la solidité financière de l’entreprise et la garantie proposée.
- Avantages : Taux généralement plus bas que les solutions de financement plus « risquées ».
- Points de vigilance : La banque examine la solvabilité, le business plan, le bilan et les projections financières de l’entreprise avant de consentir le prêt.
1.2. Le crédit d’exploitation (ou crédit à court terme)
- Objectif : Couvrir les besoins de trésorerie à court terme avec un crédit entreprise, par exemple pour l’achat de matières premières ou le paiement de salaires en attendant le règlement des factures clients.
- Modalités : Souvent accordé sur 12 mois renouvelables. Peut être lié au cycle d’activité de l’entreprise (saisonnalité).
- Avantages : Souplesse et rapidité d’accès.
- Points de vigilance : Taux d’intérêt plus élevé qu’un crédit à long terme. L’établissement bancaire peut exiger des garanties importantes (nantissement de créances clients, caution personnelle, etc.).
2. Le leasing (crédit-bail)
- Principe : L’entreprise loue un bien (véhicule, équipement, matériel informatique, etc.) auprès d’une société de leasing, avec option d’achat à la fin du contrat.
- Avantages :
- Moins de sortie de trésorerie immédiate : Pas besoin d’avancer la totalité du prix d’achat.
- Flexibilité fiscale : Les charges de leasing sont comptabilisées comme des charges d’exploitation.
- Inconvénients :
- Coût global : Le coût total du leasing est souvent supérieur à un achat au comptant ou à un crédit bancaire classique.
- Propriété du bien : Le bien reste la propriété de la société de leasing tant que le contrat n’est pas arrivé à son terme ou que l’option d’achat n’est pas levée.
3. Le factoring (affacturage)
- Définition : L’entreprise cède ses créances clients à une société d’affacturage (factor) qui lui verse immédiatement une partie (généralement 80-90%) du montant des factures. Le factor se charge ensuite du recouvrement auprès des clients finaux.
- Objectif : Accélérer l’encaissement des factures pour améliorer la trésorerie.
- Avantages :
- Réduction du risque d’impayés : Le factor peut prendre en charge l’assurance-crédit.
- Gain de temps : La gestion administrative et le suivi des paiements clients sont délégués.
- Inconvénients :
- Coût : Commissions d’affacturage et éventuellement frais d’assurance-crédit.
- Image auprès des clients : Certains peuvent ne pas apprécier d’avoir affaire à un tiers pour le recouvrement.
4. Le capital-risque (venture capital)
4.1. Pour les start-up à fort potentiel de croissance
- Principe : Des fonds d’investissement ou des investisseurs spécialisés (VC) entrent au capital de l’entreprise en échange d’un apport financier.
- Profil des entreprises concernées : Généralement jeunes, innovantes, avec un business model scalable (possibilité de croissance rapide).
- Avantages :
- Financement sans remboursement immédiat : L’entreprise n’a pas à rembourser comme dans le cas d’un prêt.
- Accompagnement : Les investisseurs apportent souvent des conseils, un réseau de contacts et leur expertise.
- Inconvénients :
- Dilution du capital : Les fondateurs cèdent une part de la propriété de l’entreprise.
- Exigences élevées : Les VC cherchent un retour sur investissement rapide et peuvent influer sur la gouvernance.
4.2. Les Business Angels
- Définition : Investisseurs privés (entrepreneurs, cadres dirigeants, etc.) qui financent des projets à un stade précoce.
- Avantages :
- Apport d’expertise : Souvent d’anciens entrepreneurs qui partagent leur expérience et leur réseau.
- Plus grande souplesse que les fonds de capital-risque.
- Inconvénients :
- Montants levés généralement plus faibles que ceux offerts par les grands fonds.
- Recherche parfois longue pour trouver le bon “angel” et négocier des conditions adéquates.
5. Les garanties et cautionnements (Sociétés de cautionnement)
En Suisse, il existe des sociétés de cautionnement (par exemple BG Mitte, Cautionnement Romandie, etc.) qui facilitent l’accès au crédit pour les PME.
- Principe : La société de cautionnement se porte garante en partie (souvent 50 à 65%) du prêt contracté par l’entreprise auprès d’une banque.
- Objectif : Réduire le risque perçu par la banque, ce qui facilite l’obtention du prêt et peut améliorer les conditions (taux d’intérêt, durée).
- Public visé : Les PME qui ont un projet viable mais manquent de garanties suffisantes pour convaincre une banque.
6. Les aides publiques et institutions de soutien
6.1. Innosuisse (Agence suisse pour l’encouragement de l’innovation)
- Rôle : Soutenir les projets d’innovation menés conjointement par des entreprises et des instituts de recherche (universités, hautes écoles spécialisées, etc.).
- Type d’aide : Subventions couvrant une partie des coûts de recherche et développement.
- Avantage : Les entreprises peuvent partager le risque de R&D et accéder à des compétences scientifiques de haut niveau.
- Limites : Les projets doivent avoir un degré d’innovation élevé et répondre aux critères de sélection (impact économique, faisabilité technique, etc.).
6.2. Programmes cantonaux et fédéraux
- Certains cantons mettent en place des fonds régionaux pour encourager la création d’entreprises ou la relocalisation d’activités.
- Possibilité de prêts à taux préférentiels, de subventions ou de rabais fiscaux sous certaines conditions (création d’emplois, projets d’innovation, etc.).
7. Le microcrédit
- Cible : Les petites structures, les entrepreneurs individuels ou les projets à impact social qui ont du mal à accéder aux prêts bancaires classiques.
- Organismes : Des fondations ou associations spécialisées (p. ex. Microcrédit Solidaire Suisse, Fondations régionales) proposent des prêts de montants relativement modestes.
- Avantages :
- Accompagnement personnalisé : Soutien, suivi et conseil en gestion.
- Accessibilité : Moins de garanties exigées que dans le secteur bancaire traditionnel.
- Inconvénients :
- Montant limité : Ne convient pas pour des projets de grande envergure.
- Taux parfois plus élevés que ceux d’un prêt bancaire classique (pour couvrir le risque plus important).
8. Le crowdfunding
- Principe : Lever des fonds auprès d’un grand nombre de contributeurs (particuliers ou investisseurs) via une plateforme en ligne.
- Formes principales :
- Crowdlending : Prêt participatif où les contributeurs prêtent une somme qui est ensuite remboursée avec intérêts.
- Crowdequity : Prise de participation au capital de l’entreprise.
- Crowdreward : Les contributeurs reçoivent une contrepartie non financière (produit, service, etc.).
- Avantages :
- Visibilité : Campagne de communication qui peut accroître la notoriété du projet ou de la marque.
- Flexibilité : Permet de lever des fonds rapidement, parfois sans exigences de garantie.
- Inconvénients :
- Incertitude du succès : Les sommes obtenues peuvent être inférieures à l’objectif.
- Travail de promotion : Exige une forte implication (marketing, préparation de la campagne, etc.).
9. Les obligations et émissions de titres (pour les grandes entreprises)
- Obligations d’entreprise : Les sociétés établies peuvent émettre des obligations sur le marché des capitaux.
- Introduction en bourse (IPO) : Pour les entreprises de taille importante ou à fort potentiel, l’introduction sur le SIX Swiss Exchange ou une autre place boursière peut être un moyen de lever des capitaux importants.
- Avantage : Accès à de larges montants, diversification des investisseurs.
- Inconvénient : Procédure coûteuse et exigeante (transparence financière, obligations réglementaires).
10. Conclusion et conseils pratiques
Pour choisir la solution de financement la plus adaptée, les entreprises suisses doivent tenir compte de plusieurs facteurs :
- Le stade de développement : Start-up innovante, PME en phase de croissance, grande entreprise déjà établie.
- La nature du projet : Besoins en fonds de roulement, investissements matériels, R&D, expansion internationale, etc.
- Le profil de risque : Solidité financière, historique de l’entreprise, garanties disponibles, perspectives de rentabilité.
- Le niveau de dilutions ou de garanties que l’on est prêt à consentir (pour le capital-risque ou les prêts bancaires).
En pratique, il est souvent judicieux de combiner plusieurs types de financement pour répartir les risques et optimiser la structure financière. L’accompagnement par un fiduciaire, un conseiller bancaire ou un réseau spécialisé (incubateur, club d’entrepreneurs, Chambres de commerce) permet de clarifier les démarches et d’augmenter les chances d’obtenir les financements nécessaires.
Avec ce panel complet de solutions (prêts, leasing, factoring, capital-risque, business angels, cautionnements, aides publiques, microcrédit, crowdfunding, obligations…), la Suisse offre un environnement favorable au financement d’entreprises de toutes tailles et de tous secteurs. L’important est de bien préparer son dossier (business plan solide, prévisions financières réalistes, argumentaire clair) et de frapper à la bonne porte en fonction des spécificités de son projet.